Architecture 1950
Elle a trouvé à Royan un terrain d'expérimentation idéal... La guerre ayant rasé absolument tout le centre ville, on donna carte blanche aux architectes des années 50 !
Article publié le lundi 2 novembre 2009
Hommage à Jean-Michel Thibault, Directeur du Conseil d'Architecture d'Urbanisme et de l'Environnement (CAUE) de la Charente-Maritime, décédé en 2009.
Il évoquait l'architecture royannaise dans les Actes des Rencontres nationales de juin 2000 : Royan 2000, un siècle deux fois construite, Editions Caue 17, septembre 2000.
L'architecture de La Reconstruction serait-elle un patrimoine élevé à la même valeur que celle des monuments historiques plus anciens, la plupart antérieurs au XIXe siècle, dont chacun s'accorde à en apprécier l'intérêt ? C'est une question à laquelle ont tenté de répondre au cours de ces deux journées historiens, chercheurs, urbanistes, venus de toute la France et même d'Allemagne et d'Italie et aussi les Royannais. Le cadre tout à fait particulier du centre ville de Royan détruit en 1945 par un bombardement allié nous a semblé tout indiqué pour nourrir ce débat, dans cette année du patrimoine XXe siècle initiée par le ministère de la Culture, année qui ne peut être seulement celle de la destruction spectaculaire de quelques barres et tours construites à la hâte dans les années 70.
La présence lors de la reconstruction de Royan des meilleurs spécialistes de l'architecture, de l'urbanisme et des techniques modernes de la construction de la France de l'après-guerre en témoigne. Claude Ferret, Louis Simon, Guillaume Gillet, Bernard Laffaille, René Sarger et bien d'autres, ont réuni sur cette ville l'application des connaissances les plus avancées dans ces domaines. Ils nous ont livré le meilleur de leur culture et de leur intelligence d'un trait de crayon inspiré ou d'une règle à calcul frétillante.
Il est vrai que Royan est le témoin tout aussi éclairé d'une autre période majeure de la conquête urbaine : celle initiée à la fin du XIXe par quelques pionniers des bains de mer, avant-gardistes d'une thalasso marine encore risquée, à l'époque où l'on savait à peine nager, consommateurs bio avant l'heure, des vertus de la sève de pin. Ici plus qu'ailleurs, le changement d'époque intervint brutalement et sur un territoire qui avait fondé son histoire sur les vertus naturalistes de la Belle Époque : la sève de ses pins, la blondeur de ses plages et les bienfaits des bains de mer. Mais la ville balnéaire constituée au XIXe siècle sur de grandes opérations de lotissement empreintes de la forme du jardin ou du parc structurés à une grande échelle sera préservée.
La troisième ville œuvre de Claude Ferret urbaniste en chef chargé de la reconstruction en appelle, sous la commande de Raoul Dautry, à la modernité ; une modernité expressionniste qui tient au plaisir d'épouser la courbe de la plage, d'évoquer à chaque détour des passerelles de ciment la présence de l'océan, d'ériger des amers, d'accueillir en son centre un marché coquillage, pour rester avec vents et marées une ville d'eau.
Cet exemple unique en Europe réunit en un même lieu les grandes dynamiques architecturales du XXe siècle : la collaboration ingénieurs-architectes, la question de l'art et de l'architecture, les théories avancées pour la fabrication des villes dans leur adaptation au contexte si particulier de l'espace balnéaire.
Il nous faudra relire textes et plans, comprendre les motifs et les structures, révéler le fondement des idées au-delà des questions de style, leçon vivante et combien actuelle pour les acteurs du renouvellement urbain.
Brochure du CAUE 17, Royan Culture, éditions Confluences, juin 2000