La Cigogne à Ronce-les-Bains
Le pignon à gradins est couronné d'un nid de cigogne. Photo de Frédéric Chasseboeuf
A cette villa est associé le souvenir de Joseph-Edouard Perraudeau de Beaufief (1821-1908), l'un des fondateurs de la station balnéaire de Ronce-les-Bains. Contrairement à ce qui est généralement affirmé, ce n'est pas lui qui a fait élever l'édifice, mais un autre personnage qui a joué un rôle important dans le développement de Ronce-les-Bains, Jean-François-Marie-Joseph-Paul de Saint-Martin-Lacaze, sur un terrain qu'il aquit en 1878. En effet, c'est en 1890 que celui-ci céda le «chalet» qu'il avait fait bâtir peu de temps auparavant sur un terrain de 2 500 mètres carrés à Joseph-Edouard Perraudeau de Beaufief, contre le peit marché de Ronce-les-Bains, un établissement acquis deux ans auparavant de ce même M. de Saint-Martin-Lacaze, mais que son nouveau propriétaire ne souhaitait pas conserver.
Le vendeur garantissait à la villa «le droit de vue dite vue d'aspect jusqu'à la mer», afin que le nouveau propriétaire puisse apercevoir le rivage depuis son habitation. En conséquence, M. de Saint-Martin-Lacaze s'engageait à ne «faire aucun travaux ni construction pouvant obstruer ce droit de vue». Joseph-Edouard Perraudeau retrouvait une demeure à Ronce-les-Bains, une station qu'il avait quittée à la suite du décès de sa femme, Marie-Caroline-Julie Cadoret de Beaupreau, survenu à Saint-Jean-d'Angély en 1878, et après avoir délaissé sa première maison de Ronce à sa fille Marie-Amélie-Marthe (1852-1905), épouse de Stanislas de Contgoureden, laquelle l'avait aussitôt mise en vente. Le «pavillon» acheté par Joseph-Edouard Perraudeau, dont l'arrière-grand-père avait fait rebâtir, peu après 1768, le charmant petit château de Beaufief, aux portes de Saint-Jean-d'Angély, prit le nom de La Cigogne en souvenir, dit-on, d'une terre qui avait appartenu à une aïeule. Vers 1920, la villa appartenait à Benard de Bert.
Avenue privée.
Située sur une ancienne dune, La Cigogne est tournée vers le sud-est et l'allée des Peupliers qui débouche sur l'avenue reliant Ronces-les-Bains à La Tremblade. Autrefois bordée de peupliers, cette allée avait, avant la constitution de nouveaux lotissements, l'allure d'une longue et belle avenue privée tracée à travers des terres basses, conduisant à un petit château. Cette apparence singulière, aujourd'hui moins perceptible en raison de l'urbanisation, différenciait La Cigogne des autres villas de la station balnéaire.
Bien que quelque peu remaniée et agrandie par l'adjonction de nouveaux corps de bâtiment renfermant des garages, la villa a encore fière allure. Elle est composée d'une partie rectangulaire à étage, coiffée d'une toiture à deux versants recouverte d'ardoises, sur laquelle se greffe, à l'angle est, un avant-corps latéral terminé par un pignon à gradins couronné par un nid de cigogne. Un pavillon rectangulaire, précédé d'une terrasse couverte portée par des arcades en plein cintre et surmontée par un balcon à balustres, se dresse au centre de la composition, dans l'angle rentrant de la façade est. Par ses proportions générales, sa toiture d'ardoises ou sa lucarne à fronton triangulaire d'un dessin des plus classiques, la villa La Cigogne prend des airs d'aimable castel ancestral. Cet effet est renforcé par l'absence de matériaux colorés et le fait que les façades sont en moellons enduits, ainsi que par la situation primitive de l'édifice, qui tourne le dos à la mer et regarde vers les terres, comme pour rappeler de façon symbolique que Jean-François-Marie-Joseph-Paul de Saint-Martin-Lacaze, tout comme Joseph-Edouard Perraudeau de Beaufief, issu d'une famille de petite noblesse de robe, conservaient tous deux l'âme de propriétaires terriens.