L'éloignement volontaire du sieur de Mons
1610 : Nouvelles perspectives
Le délai d'un an expiré, le monopole commercial de la société de Pierre du Gua était définitivement supprimé. L'année 1610 vit cependant partir deux navires de sa compagnie vers le Canada.
L'un, avec Poutrincourt arrivera début juin à Port-Royal. L'habitation avait été bien gardée par les Indiens du chef Membertou. Un prêtre, amené par Poutrincourt, baptisa Membertou (prénommé Henri en l'honneur du Roi) ainsi que toute sa famille. C'étaient les premières conversions officielles depuis la mission confiée en 1603 au sieur de Mons. L'autre navire emmena Champlain à Québec. C'est là qu'il apprit la mort d'Henri IV, assassiné le 14 mai 1610. Pierre Dugua perdait ainsi celui qui avait été son protecteur. Au lieu d'hiverner à Québec, Champlain revint en France en septembre 1610. En décembre de la même année, le sieur de Mons assista en tant que témoin à la signature du contrat de mariage de son lieutenant Champlain avec la toute jeune Hélène Boullé dont la dot était bienvenue pour les entreprises canadiennes de son époux.
La relève se prépare
Port-Royal, en 1610, Poutrincourt démuni de tout subside pour entretenir la colonie, envoya en France son fils Charles, à la recherche d'appuis financiers.
Celui-ci entra en contact avec deux pères Jésuites qui acceptèrent d'avancer les sommes nécessaires à condition d'être eux-mêmes du voyage. C'est ainsi que commença l'implantation des Jésuites en Nouvelle-France. De son côté, Champlain embarqua, en mars 1611, sur un navire équipé par le sieur de Mons et ses associés. Il avait pour mission de veiller au bon état de l'Habitation de Québec et aussi de poursuivre l'exploration de la vallée du Saint-Laurent. Au cours de l'été 1611, il repéra le site de Montréal et une île qu'il baptisa Sainte-Hélène, en l'honneur de son épouse. Il y jeta les fondations d'un fort et fit quelques essais de culture.
Construction d'un fort. Gravure extraite Admirante narratio... par Thomas Harriot 1585-1588. Bibliothèque Vaticane.
De Mons renonce à sa charge de lieutenant général
A Paris, à la fin de 1611, les associés de Pierre Dugua de Mons lui firent savoir que le monopole étant supprimé, ils se retiraient de la société. Celle-ci se trouvait donc dissoute et pour sauver Québec de l'abandon, Pierre Dugua de Mons dut racheter leur part. D'accord avec Champlain, il décida de renoncer à son titre de lieutenant général, au profit d'un grand personnage qui pourrait assurer la survie de la Nouvelle-France.
En novembre 1612, le jeune Louis XIII lui donna pour successeur Henri de Bourbon, prince de Condé, qui reçut le titre de Vice-roi(6.7). Celui-ci s'empressa de confirmer la lieutenance de Champlain à Québec. La continuité semblait donc assurée. Pourtant, l'année suivante en Acadie, le capitaine anglais Samuel Argall, venu de Virginie où les Anglais étaient établis depuis 1607, dévasta l'île Sainte-Croix où subsistait une petite colonie française. Le 1er novembre 1613, il se présenta devant Port-Royal. L'habitation était déserte. Les hommes étaient aux champs. Argall pilla les bâtiments, y mit le feu, s'empara des chevaux et s'acharna sur les marques de la souveraineté française. L'Acadie mettra de longues années à se relever de cette agression.
< Portrait d'Henri de Bourbon, prince de Condé. Col. J. Daniel
En savoir plus : Pierre Dugua de Mons de Guy Binot et Samuel de Champlain, carnet de voyage au Canada et Lorsque les gens découvraient l'Amérique de Bernard Mounier & Patrick Henniquau aux Éditions Bonne Anse