Premiers greffons 1604-1605
L'Île Sainte-Croix
Parti au début d'avril 1604, Le Don-de-Dieu, à bord duquel se trouvaient Dugua de Mons et Champlain, atteignit les côtes d'Acadie (actuelle Nouvelle-Écosse) dès les premiers jours de mai.
Le navire toucha le Cap de la Hève, puis le Port au Mouton. Apès avoir exploré le sud et l'ouest de la péninsule acadienne, à bord d'une chaloupe, Dugua de Mons et Champlain traversèrent la Baie Française (Baie de Fundy). Sur la côte de l'actuel Nouveau-Brunswick, ils découvrirent la rivière Saint-Jean puis la rivière Sainte-Croix où ils remarquèrent une petite île que Dugua nomma île Sainte-Croix. Ils décidèrent de s'y établir. Tous s'activèrent durant l'été à la construction de l'Habitation. Fin août 1604, le Don-de-Dieu regagna la France avec Poutrincourt tandis que quatre-vingts hommes dont Dugua et Champlain demeuraient à l'île Sainte-Croix. L'hiver 1604-1605 fut précoce et particulièrement rigoureux. Le scorbut fit son apparition et sur les quatre-vingt hivernants, trente-cinq ou trente-six périrent. Le prêtre et le ministre de la religion réformée se querellaient sans cesse, Samuel Champlain écrivait :
J'ay veu le Ministre et nostre curé s'entre-battre à coup de poing, sur le différend de la religion... Je vous laisse à penser si cela estoit beau à voir ; les sauvages estoient tantost d'un côsté, tantost de l'aute et les François meslez selon leur diverse croyance, disoient pis que pendre de l'une et l'autre religion, quoy que le sieur de Mons y apportast la paix le plus qu'il pouvoit... (ils) moururent presque en mesme temps; les matelots qui les enterrèrent, les mirent tous les deux dans une mesme fosse pour veoir si morts, ils demeureroient en paix, puisque vivants ils ne s'estoient pu accorder.
La relève tant attendue n'arriva qu'à la mi-juin 1605. Aussitôt, Pierre Dugua de Mons partit en exploration avec Champlain pour reconnaître les territoires qu'il avait mission de coloniser. Ils espéraient aussi repérer un site d'habitation plus favorable que l'île Sainte-Croix. Le voyage fut l'occasion de maintes rencontres et fraternisations avec les autochtones. Ils furent partout bien reçus, échangeant avec les indigènes de menus présents. En toutes circonstances, Pierre Dugua de Mons fit preuve d'une grande bienveillance et d'un sens certain de la diplomatie. Ils atteignirent au sud un abri baptisé Port Mallebare (actuel Cap Cod à la latitude de Boston) mais presque à court de vivres, l'expédition regagna l'île Sainte-Croix, au début d'août 1605.
Figures de Montagnais et des Sauvages « almonchicois » (Abenaquis).
Gravure extraite des Voyages du sieur Champlain -1673.
Port-Royal
Après l'épouvantable hiver à Sainte-Croix, il fallait trouver un nouveau havre avant les grands froids. Le site de Port-Royal, sur la côte ouest de l'Acadie, avait été reconnu et baptisé au printemps de 1604 par Champlain.
C'est là que la colonie, abandonnant l'île Sainte-Croix, décida de s'établir. La construction d'une nouvelle habitation fut entreprise avec une partie des matériaux apportés de l'île Sainte-Croix. Les bâtiments furent regroupés autour d'une cour afin de faciliter la défense et de limiter les déplacements à la mauvaise saison. Port-Royal, fondé l'été 1605, fut après l'île Sainte-Croix, le berceau du Canada actuel. Le sieur de Mons, absent de France depuis seize mois, devait y retourner pour rendre compte au roi de sa mission et défendre son monopole, qu'il savait menacé par des concurrents. Il prit soin de rapporter avec lui diverses « curio sités » dont un orignal femelle qu'il fit admirer à la Cour, ainsi qu'un canot en écorce de bouleau que l'on fit naviguer sur la Seine au grand amusement du Dauphin, le futur Louis XIII. Champlain demeura à Port- Royal, résolu à poursuivre son exploration vers le sud avec l'assentiment du Lieutenant général.
En savoir plus : Pierre Dugua de Mons de Guy Binot et Samuel de Champlain, carnet de voyage au Canada et Lorsque les gens découvraient l'Amérique de Bernard Mounier & Patrick Henniquau aux Éditions Bonne Anse