La remontée du filet

panneau801Le touriste qui, pour la première fois visite la côte saintongeaise, intrigué par ces curieuses constructions qui jalonnent le rivage, se pose la question : comment pêche-t-on au carrelet ? La pêche au carrelet est un peu une loterie, où le hasard, beaucoup plus que la technique, a sa part. Alors qu’à la pêche à la ligne les oscillations du bouchon annoncent le poisson, rien ici, n’indique le moment d’agir. On tourne le treuil et quand le filet remonte, il est vide ou plein. Seul le hasard commande. Et le filet est bien plus souvent vide que plein.

 

Seul Jules Verne pouvait imaginer, au carrelet,
une pêche aussi miraculeuse !
(Dessin de BENET pour “ La Jangada ”).

 

panneau805Lorsque que la marée montante couvre suffisamment l’estran au pied du carrelet, la pêche peut commencer. Le pêcheur détache les cordages retenant le cadre à la rambarde et descend le filet dans l’eau. Et au bout de quelque temps, le remonte. Toute la technique consiste à remonter doucement le filet tant qu’il est dans l’eau, pour ne pas effaroucher les poissons qui éventuellement se trouveraient au-dessus, puis, une fois le filet hors de l’eau, le relever vivement pour éviter que les poissons ne sautent par-dessus le cadre. Il ne reste plus qu’à récupérer les poissons avec la sallebarde (épuisette à long manche) et redescendre le filet, remettant ainsi à l’eau tout ce qui ne mérite pas la peine d’être ramassé. C’est donc bien là, peut-on dire, une pêche écologique !

 

Meschers-les-Bains, Maigre prise au carrelet le 11 Juin 1905
Hauteur : 1m 45 - Poids : 70 livres - Envergure : 94

 

Au fait, que pêche-t-on au carrelet ?

D’abord le temps, qui s’écoule avec les goutelettes qui retombent quand on lève le filet. Le plus souvent, du bourrier, des marmous (méduses), des chancres (crabes) pour appâter les trulots, et puis tout un menu fretin qui ne vaut pas la peine d’être ramassé, des douzilles (tout nu), parfois une gatte (alose feinte) pleine d’arêtes et tout juste bonne pour le chat ! Avec plus de chance, des plies (carrelets), des anguilles et des meuilles (mulets), un congre pour la soupe. Bar et maigre sont les gros lots de cette loterie qu’est la pêche au carrelet.

Ajoutons à cela, parfois, des raies et des trembles (torpilles), des « concombres » (éperlans) et enfin, « aux vendanges » des crevettes. Il faut aussi parler des pêches miraculeuses qui restent dans les annales : les mulets qui emplissent le filet au point de le faire craquer, le maigre de 70 livres pêché en juin 1905 et qui mérita d’être tiré en carte postale, et le poisson scie qui, en deux coups de son outil, s’échappa en déchirant le filet où il s’était fait prendre, au printemps de 1940, dans le port de Royan.

Tout cela est bien aléatoire et comme dit un pêcheur « quand je veux manger du poisson, je vais chez le poissonnier ! ».
Mais le pêcheur trouve toujours meilleur ce qu’il a pêché.­

 

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