Royan pionnière de l'aéronautique
Article publié le 29/07/2014 par Christophe Soulard
Attractive en raison de son climat et ses plages de sable fin, la ville de Royan-les-Bains est aussi connue être pour être pionnière en matière aéronautique. Selon la revue Océana de juin 1909, la station balnéaire a l'honneur de constituer la première section de la Ligue nationale aérienne qui, bientôt, compte près de 90 membres. Il n'en faut pas plus pour organiser, en septembre 1910, la première semaine de l'aviation. Cette grande manifestation est généralement concomitante avec la grande fête donnée chaque année en l'honneur de l'escadre.
C'est au cours de cette première Fête de l'aviation que Louis Gibert (1885-1956 - photo ci-contre) réalise un petit exploit. Ce jeune homme de 25 ans qui fait partie des cent premiers pilotes brevetés dans le monde (il est titulaire du brevet n°92), revient de Bordeaux où il a participé à la Grande semaine. Il rallie Royan, avec son monoplan Blériot, identique à celui qui avait franchi la Manche en 1909. Surtout, après 156 kilomètres d'une traite (ce qui constitue une belle prouesse), il parvient à atterrir sur la plage de Pontaillac. Le lendemain de cet exploit, il redécolle fait le tour de la rade par le Verdon, Pontaillac et survole la chapelle des aviateurs dédiée à Notre-Dame du Platin. Il lance un bouquet de fleurs sur la chapelle, puis il s'en va contourner le phare de Cordouan et se pose devant une foule enthousiaste sur la Grande Conche. En mettant pied à terre, il écrit : " J'irai toujours plus haut, toujours plus loin...sous la protection de Notre-Dame du Platin ".
Le vendredi 23 septembre dans l'après-midi, il se livre à des exhibitions au-dessus de la Grande Conche. Deux jours plus tard, il traverse l'estuaire, revient et atterrit, acclamé par une foule considérable. L'événement est tellement considérable et la renommée de l'aviateur si grande que le quotidien Royan dirigé par Victor Billaud, en fait sa une à plusieurs reprises.
En septembre 1911, c'est au tour de Marcel Brindejonc des Moulinais (1892-1916) [1] qui lui aussi vole sur un monoplan Blériot (photo ci-dessus), d'atterrir sur la Grande Conche et ce, juste avant d'effectuer lui aussi un pèlerinage au-dessus de Notre-Dame du Platin. Les conditions de vol sont assez mauvaises : vent et pluie. Cela n'empêche pas près de 20.000 personnes (selon le Journal de Royan du 24 septembre) « de saluer avec des bravos enthousiastes les beaux vols du sympathique aviateur ». Plusieurs aviateurs participent à l'édition suivante qui est avancée fin août : René Dely sur un monoplan Sommer (dont il est chef pilote), A. Guée sur un monoplan Blériot, leur comparse Séguin, etc. L'avion du premier tombe à la mer. Dely est sauvé et son appareil repêché très endommagé. Quant à Séguin son train d'atterrissage se casse à son arrivée sur la plage. L'année 1913 voit revenir Marcel Brindejonc des Moulinais qui effectue, les 6,7 et 8 septembre, un nouveau pèlerinage aérien au-dessus de Notre-Dame du Platin et survole les cuirassés de l'escadre qui mouillent au large de Royan. Le journal de Royan rapporte qu'il a effectué ses « très audacieux vols » avec des passagers « parmi lesquels Mlle Lily Bunster de Liverpool, Mme et M. Frachon, Messieurs Peigne, docteur Marchac, Lecoeur, Breton, Sarlon, Mlle Caro, Mme de Mare ». Enfin, Le 3 mai 1914, c'est l'atterrissage sur la grande conche du lieutenant Bréhier avec le sapeur Pacard (URR 3 mai). Avant que les grandes heures aériennes de Royan ne viennent à cesser avec la déclaration de guerre, ces manifestations drainent les foules, rythment la vie des locaux et des estivants.
Départ de Brindejonc des Moulinais devant la Restauration de Pontaillac. Coll. G. Moine
[1] Décoré de la Légion d'honneur à 21 ans, il est mobilisé et tué le 18 août 1916 par deux Nieuport français qui l'avaient pris pour un Allemand.