Richard Texier

L'arrivée au Phare, le 8 mai 2003, c'était comme une caravane dans le désert, n'eût été la mer grignotant le chemin : une demi-douzaine de porteurs de caisses et de châssis, et Richard avec un gros sac bleu sur la tête, marchant sur le sable...
Serge, Régis, Daniel et les autres, les gardiens du monument, ne pouvaient savoir quelle étrange parenté allait se nouer au fil du temps, entre eux-mêmes et l'arrivant de cette relève insolite. Celui-ci s'installa dans l'appartement "du Lieutenant du Roi et des ingénieurs", au plafond de chêne en forme de carène de bateau, et procéda à une mise en scène radicale du dit appartement, le transformant en atelier d'artiste-nomade, ce qui était sans exemple connu dans l'histoire de Cordouan.

À ce moment, personne n'imaginait encore que les marées, pendant 49 jours, déposeraient ici, outre les vagues touristiques habituelles, un contingent flottant de familles, parents, amis, assistants, graveurs, galeristes, antiquaires, collectionneurs, journalistes et élus du peuple, tous pèlerins halieutiques et curieux aux pieds mouillés, porteurs de présents gastronomiques, propres à atténuer la solitude supposée du naufragé volontaire. Puis, les marées remportaient les visiteurs, l'atelier retrouvait sa fonction laborieuse, la nuit sélectionnait impitoyablement ses adeptes.

Pendant la durée du séjour, le climat fut clément et l'océan, aimable. Thalassa consacrant une émission à l'aventure, les gardiens et les pilotes des embarcations devinrent les complices comblés de cette notoriété. La première ascension des 301 marches, avait permis à Richard de vérifier ce qu'il soupçonnait déjà : la mer, en se retirant, dessinait, sur le banc de sable et les roches, les contours aléatoires de surfaces d'exception, telles qu'il les reproduisait, depuis des lustres, dans ses propres œuvres.

Cette découverte lui fit accroire qu'il fut prédestiné à venir en ces lieux pour affiner son inspiration. A cet instant, l'atterrissage symbolique d'un mystérieux pigeon-voyageur (adopté, il fut appelé Bruno), sembla confirmer l'hypothèse. Par la suite, grâce à l'apport massif de vieilles cartes marines en folio, les fonds de toiles évoluèrent en fonds de cartes, sur lesquels coulèrent les couleurs. Alors, les territoires des peintures se substituèrent à ceux des cartes, et la lumière des siècles, du haut des 66 mètres, éclaira la naissance alchimique d'un Nouvel Atlas du Monde, à reconnaître sous le nom de Cordouan-Texier.

Le samedi 28 juin 2003, à la mi-nuit, une théorie de lucioles quittait le Phare, escortant le peintre pour le restituer au continent, le jour de son anniversaire. Dès lors, c'était au Vieux Clocher de Saint-Palais-sur-Mer de prendre la relève des gardiens de Cordouan, et de propos aux amateurs une visite guidée, parmi les arcanes d'une géographie de l'illusion aux noms évocateurs : Étang de terre, L'île verticale, Baie si belle, Sable à secret, Défense par l'ouest, L'archipel du lendemain... Autant de paysages chimériques invités désormais à porter témoignage de la correspondance accomplie entre le peintre et la lanterne prodigieuse...

Bernard Mounier

 

Ces œuvres ont été réalisées alors que Richard Texier était en résidence nomade au phare de Cordouan en mai et juin 2003

 
 

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