Villa Jeanne-Marcelle
Parc n°3
- ZPPAUP
D'une fierté sans égale pour une villa implantée dans un simple cul-de-sac, Jeanne-Marcelle cherche à imposer sa suprématie par des lignes verticales qui écrasent toutes ses voisines. Mais l'autoritarisme architectural qui aurait dû lui assurer une indéniable légitimité sur son fief de fond d'impasse a du mal à convaincre. En effet, Jeanne-Marcelle a poussé tout en hauteur sur une parcelle de terrain d'une exiguïté déroutante, si bien que cette vieille dame de briques et de pierres, aujourd'hui centenaire, donne encore l'impression d'une éternelle adolescente qui aurait grandi trop vite.
Comme une plante qui s'épanouit en fonction de la lumière, Jeanne-Marcelle a cherché, au prix d'efforts, démesurés à bénéficier d'un point de vue sur l'estuaire de la Gironde et le grand large. Pour cette raison, ses concepteurs ont été contraints d'étirer au maximum sa tour carrée, posée au-dessus du porche d'entrée, dans l'angle rentrant de la façade principale. Plutôt discrète dans ses parties inférieures, cette tour est couronnée par une chambre panoramique qui pourrait conférer un certain cachet à l'édifice si elle n'était pas plaquée contre une lourde excroissance de toiture, où sont lovés quelques espaces de circulation.
Paradoxalement, ce sont ces éléments, que d'aucuns jugent incongrus, qui apportent à Jeanne-Marcelle les touches d'originalité lui assurant une certaine personnalité. D'ailleurs, ils égarent volontiers l'œil pour lui faire oublier les nombreux points communs qui l'unissent à Lionel-Caprice, sa plus proche voisine, qui se révèle être également sa plus sérieuse concurrente. De nombreuses similitudes dans le traitement des angles, la conception de la tour porche et de sa chambre panoramique, le dessin des encadrements des baies ou la façon d'inscrire le nom prouvent que les deux demeures ont été élevées en même temps. Il faut sans doute en attribuer la paternité à l'entrepreneur Michel Ricoux (voir p.379) dont le nom est encore inscrit en fragiles lettres peintes au pochoir sur l'une des façades de Lionel-Caprice. Pour éviter qu'on ne les interprète comme deux sœurs jumelles, et que l'on soupçonne par conséquent leurs propriétaires respectifs de s'être adonnés à un art du paraître d'entrée de gamme, Jeanne-Marcelle et Lionel-Caprice se tournent le dos et semblent vouées à un destin différent. Mais ce n'est qu'une illusion, car ce choix d'implantation, loin de les opposer, leur assure la discrète complicité que leur impose une paternité sans doute commune.
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