Humour et Eau Salée
Article publié en 2005
Marie-Anne Bouchet-Roy
Avec les compagnies de rue qui investissent la ville, les stars qui occupent la scène et les jeunes qui brûlent les planches du "village pipole", le Festival Humour et Eau salée soulève de légères turbulences sur Saint-Georges-de-Didonne mais personne ne songe à résister.
Avis au touriste distrait qui, ayant réservé longtemps à l'avance ses vacances à Saint-Georges-de-Didonne, n'a pas consulté le programme des animations.
Tous les mois de juillet, la petite station balnéaire implose pendant les quatre jours du Festival Humour et Eau salée.
Pendant sa sieste au soleil, notre estivant risque de voir arriver par bateau un corbillard qui remontera toute la plage suivi du cortège en pleurs, il peut tomber à l'heure des courses, sur un mariage à l'église qui se termine par une rixe entre les époux et leurs familles respectives, ou encore il pourra lire, sur une banderole installée sur l'échafaudage de l'église en réfection : «changement de propriétaire».
Un peu ébranlé, le vacancier finira par comprendre que le Festival comporte un important volet «Arts de la rue» qui consiste à laisser des Compagnies occuper la ville et le bord de mer avec leurs prestations «facétieuses», pour ne pas dire délirantes, burlesques et bouffonnes, et leur sens des limites très relatif.
Les Saint-Georgeais, cueillis par surprise en 1986 lors de la première édition d'Humour et Eau salée, ont eu quelques années pour s'habituer à cette éruption régulière dans leur quotidien estival. À la veille du 20ème anniversaire du Festival qui sera fêté en 2005, ils ont adopté la manifestation et certains se font complices des artificiers de la rue en ouvrant par exemple leurs vitrines ou leurs étals de fruits et légumes aux énergumènes, habillés ou pas, de la Compagnie Cacahuète, auteurs des méfaits cités plus haut.
Les Compagnies de rue ne sont pas les seules à quadriller le terrain. Tous les ans, les meilleurs humoristes occupent la scène du complexe Colette Besson ou la scène du village «pipole» planté sur la plage, lieu de spectacle et d'exposition absolument ouvert au public, contrairement aux tentes people, habituellement fermées au commun des mortels.
Peu d’artistes sont passés au travers des mailles du filet tendu par l'association CREA et l’équipe organisatrice du Festival emmenée tout d’abord par Michel Mandeau puis à partir de 1998 par Didier Trambouze.
Petit échantillon pour éviter l’énumération fastidieuse : Les Inconnus, Marc Jolivet, le Quatuor, Alex Métayer, Pierre Palmade, Jean-Marie Bigard, Sylvie Joly, les Vamps, François Rollin, Django Edwards, Laurent Ruquier, l’Ultima Recital, Laurent Gerra, Elie Seimoun, Shirley et Dino, Jamel Debouzze.
Il était juste que ce remue-ménage à Saint-Georges de Didonne ait quelques répercussions au niveau national. Cette légitime préoccupation a donné naissance, en 1992, au Grand Prix Iznogoud, décerné par un jury dans lequel figure Jean Tabary, auteur du personnage de bande dessinée.
Cette récompense est décernée à une personnalité connue qui a clamé haut et fort qu’elle voulait devenir calife à la place du calife et a échoué de façon aussi retentissante. De quoi chatouiller un peu l’ego des «importants» et s’assurer que le Maire de Saint-Georges, Jean-Michel Renu ainsi que son prédécesseur, Dominique Bussereau, toujours membre du Conseil Municipal, Député et Secrétaire d’Etat au budget depuis 2004, gardent intact leur sens de l’humour.
D’autant que le Prix a trouvé quelques victimes dans les rangs de l’actuelle majorité présidentielle, notamment Alain Juppé en 1997 ou Nicolas Sarkozy en 1999, actuel ministre de tutelle de Dominique Bussereau.
Dominique Bussereau passe le relais à Jean-Michel Renu (photo Serge Roy)
La Municipalité soutient sans réserve le Festival et va jusqu’à prêter main forte aux Compagnies de rue. Les Saint-Georgeais se souviennent des courses loufoques de petites voitures électriques conduites par les artistes, les partenaires, les élus en combinaison de pilote et casques de chantier, Dominique Bussereau et Jean Michel Renu en tête et même un certain Jean-Pierre Raffarin, président du Conseil Régional.
Taxyfolia
Évidemment, tout cela ne va pas sans quelques menus inconvénients, totalement indépendants de la volonté des organiseurs. Pour en revenir à notre touriste, sa dernière nuit de repos à l'hôtel sera peut-être interrompue vers 3 heures du matin par la chanteuse d'Ultima récital qui ne peut se résoudre à quitter ceux qui l'ont raccompagnée sans «leur en chanter une petite...». Mais sans s'en rendre compte, tout en bronzant, notre estivant aura sûrement suivi le mot d'ordre du Festival 2004 : «Evacuez le stress !!».
Plus d'informations
http://www.crea-sgd.org/