Un grand journaliste
Nos efforts tendront toujours à faire de notre journal, une feuille fidèlement renseignée
Victor Billaud
A 22 ans, rempli d'ardeur et de talent, Victor Billaud fonde son propre journal, à Saint-Jean d'Angély, La Chronique charentaise, dont le premier numéro paraît, le 15 octobre 1874, imprimé par son beau-père, Eugène Lemarié. Avec ses articles consacrés à la littérature, à la poésie ou aux sciences, cet hebdomadaire aux visées ambitieuses qui s'adresse à une clientèle instruite, tient plus de la revue que d'un journal et les numéros sont conçus pour être réunis chaque année en volumes. Billaud, rédacteur et gérant, abandonne sa publication, fin 1876, quand il déménage pour rejoindre Frédéric Garnier, à Royan.
Dans sa nouvelle ville, il imprime immédiatement le Phare Littéraire, au titre plein d'enthousiasme. Malgré la collaboration de Pierre Jônain, d'Henri Clouzot, et ses informations précises sur la ville, le journal, sans doute peu adapté au milieu local, ne remporte qu'un médiocre succès et se voit remplacé, le 16 juin 1878, par la Gazette des Bains de Mer, le temps de l'été.
Après un hiver de réflexions, Victor Billaud fait paraître le 13 avril 1879, le numéro 1 de la nouvelle Gazette des Bains de Mer, au prix de vingt centimes. Quelques hésitations sur la présentation de la première page, sur le choix des illustrateurs, et Billaud confie le dessin de la manchette à Henri Somm puis à Duplais-Destouches, le journal prenant alors sa forme définitive.
Le succès de la Gazette
L'appel à Barthélemy Gautier qui, à partir du 2 mai 1880, collabore à la Gazette, assure le succès immédiat. Chaque dimanche, les lecteurs de plus en plus nombreux retrouvent avec curiosité, sur la une, les Gens de Mazerolles ou les Croquis saintongeais. Quand Barthélemy Gautier décède en 1893, René, le fils aîné de Billaud, prend la relève, mettant à son tour en scène les paysans charentais, sinon avec originalité, du moins avec un crayon très sûr.
Excellent journal d'information, la Gazette s'intéresse aux événements nationaux ou internationaux aussi bien qu'à l'actualité politique ou littéraire. On y trouve particulièrement l'évocation de problèmes intéressant un public de paysans, viticulteurs, pêcheurs ou ostréiculteurs. La Chronique de Royan est une mine de renseignements sur la vie de la cité : de l'État Civil aux décrets municipaux, de la date des fêtes à celle des comices agricoles, des faits divers les plus variés aux aménagements de la cité, tout est relaté avec la plus grande précision. Journaliste complet, Billaud sait rendre attrayant son journal, tout en prenant résolument parti dans les joutes électorales, assurant de son appui le maire Frédéric Garnier, les républicains ou ceux qui défendent les intérêts de la station. L'été, la Gazette se transforme en un véritable journal balnéaire, avec sa Chronique de la Plage ou sa Chronique des Bains, s'adressant cette fois davantage aux touristes (les « étrangers ») et publie cette fameuse Liste des étrangers qui, si elle n'est pas particulière à la Gazette, s'allonge de façon impressionnante.
Le « magnat » de la presse
Véritable magnat de la presse, Victor Billaud fonde, le 1 janvier 1882, six autres journaux, frères de la Gazette, qu'il imprime à Royan et dont il est le Directeur général : les Annales de La Rochelle, le Courrier de Rochefort, la Chronique de Saint-Jean d'Angély, L'Écho de Jarnac, le Journal de l'Ile d'Oléron, le Mémorial de Saintes.
Enfin, en 1893, il crée un autre journal balnéaire, le Royan, dont son fils Pierre, prend la direction, en 1922. À ce moment, on ne trouve plus que quelques numéros épars de la Gazette, le Royan devenu hebdomadaire, étant le seul journal de Victor Billaud qu'il dirige jusqu'à sa mort, en 1936.
Grande figure du journalisme dans la région, Billaud a été, pendant plus de 50 ans, l'homme de presse le plus remarquable de son temps.
En savoir plus : Victor Billaud, Le chantre de Royan de Monique Chartier, aux Éditions Bonne Anse.