Victor Billaud et Frédéric Garnier
Royan n'arriva à son prodigieux épanouissement que sous l'administration de M. Frédéric Garnier
Victor Billaud
Il y a loin de la petite cité royannaise, que découvre Victor Billaud, en 1877, circonscrite entre le terre-plein de Foncillon, marquant l'emplacement de l'ancien Château et les abords du Parc, à la grande station balnéaire qu'elle sera. Quand Frédéric Garnier devient maire, en 1871, la ville n'est qu'une bourgade de 4 500 habitants aux équipements sommaires : un port de pêche et de commerce d'importance secondaire présente des difficultés d'échouage ; les rues sont éclairées au gaz depuis 1869 ; la ville n'a toujours pas d'église, hormis Saint-Pierre. Près de 18 000 baigneurs, Bordelais arrivés par le bateau à vapeur, Rochefortais transportés par la diligence ou clientèle de l'arrière-pays, se pressent sur les plages. Pour les accueillir, quelques grands hôtels (Hôtel de Bordeaux, Hôtel d'Orléans), des hôtels plus modestes dans le Bas Royan ou la location « en garni » chez l'habitant. Pour les distraire, les plages avec leurs cabanes de bains, un casino ouvert en 1845, situé en arrière de la façade de Foncillon, qui offre ses salles de danse et de musique, ses salons de lecture, ses jardins reliés par un pont de bois à une terrasse d'où l'on domine la Gironde, ou encore quelques cafés dont le plus fréquenté est le Café des Bains.
L'essor d'une ville
Soutenu par la publicité de Victor Billaud, Frédéric Garnier, qui est d'abord conseiller général de l'arrondissement de Marennes, fait connaître à la ville un essor considérable. Grâce à leurs idées communes, à leur même désir de voir la cité se développer, de multiples projets vont se réaliser. Des rues se créent, des boulevards donnent accès à Pontaillac et Saint-Georges de Didonne, des villas se construisent. « De nouvelles maisons et de nouveaux chalets sortent de terre, comme par enchantement », écrit Billaud, le 10 juin 1883. En 1885, le lotissement du Parc permet à la ville de s'étendre à l'ouest tandis que le quartier de Pontaillac s'agrandit. Le somptueux casino de Foncillon est ouvert en 1884, mais voit bientôt son éclat éclipsé par la construction du Grand Casino Municipal, inauguré en 1895. Pendant ce temps, la ville s'équipe d'un château d'eau, d'égouts collecteurs, de plusieurs écoles, d'un nouveau port, d'une caserne, d'un Institut collégial... L'électricité remplace l'éclairage au gaz, du moins dans les quartiers fréquentés par les baigneurs. Quant au fringant Decauville, depuis 1890, il transporte nonchalamment de plage en plage, une foule de touristes ravis. Durant cet âge d'or que connaît la cité, quel est le rôle de Victor Billaud ?
Billaud, le soutien du maire
Son amour de la ville, sa tâche de publicitaire officiel, sa volonté de faire de Royan une station réputée et, plus encore, son amitié indéfectible pour Garnier, le conduisent à appuyer chaque décision, le plus souvent à proposer de nouveaux projets et à en favoriser l'exécution, au moyen de son journal. Il lui faut donc soutenir la candidature de Garnier et, à chaque élection, la Gazette des Bains de Mer de Royan prend une tournure politique et participe aux querelles qui agitent la cité. Billaud se lance dans de violentes polémiques, notamment dans la « guerre des casinos », se livrant à des attaques acérées contre les conservateurs, candidats rivaux de Garnier. La dureté des échanges entre les journaux, les injures dont est accablé Billaud, surprennent quelque peu... mais les républicains triomphent et Garnier reste maire, conseiller général jusqu'à sa mort, en 1905. Sur les conseils de Billaud, il se présente aux législatives, est élu député en 1889, avant de devenir sénateur, en 1903.
Animés par un même idéal républicain, Garnier et Billaud se complètent avec bonheur. L'un, par ses fonctions, attire dans la ville les hauts fonctionnaires et les hommes politiques, l'autre, les personnalités littéraires et artistiques. En 1905, Royan, station réputée et moderne, connue dans toute la France, compte 10 000 habitants et accueille 120 000 baigneurs. N'est-ce pas le résultat des liens qui les unissent, tous deux nourris d'espoirs et d'ambitions semblables ? En 1934, Victor Billaud se souvient : « La sympathie que nous ressentions l'un pour l'autre, de plus en plus vive, devint une amitié solide faite d'estime, de confiance, d'affinité de sentiments et de vues, et sur laquelle aucun nuage ne vint jamais passer. »
En savoir plus : Victor Billaud, Le chantre de Royan et Royan sur Maires de Monique Chartier, aux Éditions Bonne Anse.