Antoine Bauchère
Pilote lamaneur
Photo D. Bauchère.
*Je ne pouvais me douter qu'à peine un an après cette mission, le 6 avril 1814, Le Régulus, plutôt que de tomber entre les mains des Anglais, serait sabordé et incendié par son équipage, devant Meschers, en face des grottes portant maintenant son nom.
Mon nom est Antoine Bauchère, pilote lamaneur, né le 24 mars 1784 à Meschers et baptisé par le pasteur Jarousseau.
Embarqué comme mousse à l'âge de neuf ans, j'ai été reçu à l'examen d'aspirant pilote de la Gironde, le 7 mai 1808. Après avoir été capturé puis relâché par les Anglais lors de la bataille navale du 25 août 1811, au large du Verdon, j'ai été proposé, le 20 décembre de la même année, au poste de pilote lamaneur de la station de Royan, laissé vacant par la mort de mon père.
Le 17 mars 1813, je reçus l'ordre suivant : « Sur la demande de M. le capitaine de Vaisseau Reynaud, et d'après les circonstances urgentes qui exigent que le pilotage du vaisseau Le Régulus soit confié au plus habile et expérimenté des pilotes de la Gironde, nommons le pilote Bauchère pour prendre le pilotage de ce vaisseau... »
J'exécutai la mission et amenai le vaisseau depuis Maumusson par les voies les plus sûres, ce qui me valut une belle citation − parvenue seulement 10 ans après, le 3 octobre 1823 − assortie de la Légion d'Honneur :
« En 1813, il pilota le vaisseau Le Régulus, de 74 canons... et le fit passer dans Maumusson, qu'on avait cru jusqu'alors impraticable aux navires du premier rang. C'est un service inappréciable qu'il a rendu à la marine... »*
Par la suite, j'ai collaboré avec l'hydrographe en chef de la Marine Beautemps-Beauprès, afin de reconnaître les côtes de l'embouchure de la Gironde, de l'estuaire jusqu'à Pauillac et celles du pertuis de Maumusson. Je fus Syndic de la station des pilotes de Royan à partir de 1920, jusqu'à ma démission le 31 octobre 1851, que j'ai motivée ainsi : « Arrivé à un âge qui ne me permet plus d'exercer les pénibles et rudes fonctions du pilotage et comprenant que la station de Royan a besoin de recruter des hommes jeunes et vigoureux et que si les pilotes vieux et infirmes comme moi ne prenaient le parti de se retirer, le commerce pourrait bientôt en souffrir notablement... »
Après ma mort, le 16 novembre 1860, à 76 ans, je fus inhumé au cimetière protestant de Royan. On voit, sculptés sur la dalle de mon tombeau, les emblèmes de la Légion d'Honneur et ceux de la Franc-Maçonnerie, à laquelle j'ai appartenu. "
« Brick en perdition près de la côte ».
Lithographie de Théodore Gudin, peintre officiel de la Marine, 1828. Collection Bernard Mounier.
Gloire aux pilotes de la Gironde de Bernard Mounier aux Éditions Bonne Anse.