Pontaillac une plage de légende
Jusqu'en 1856, Pontaillac ne comptait qu'une seule habitation. D'après une légende que rapporte le journaliste Henri Clouzot, il s'agissait de l'ancienne métairie où avait dû se réfugier autrefois le père du seigneur des Martinets, victime d'un fils ingrat et d'une grande prodigalité. Après avoir enfin reconnu ses fautes, le jeune homme prit le chemin de Rome, afin de soulager sa conscience et d'obtenir l'absolution du Pape. À son retour, il ne trouva plus rien du fier château qui lui valait le titre de baron de Pontaillac. Dans un accès de colère, la mer l'avait emporté pour le remplacer par la conche que nous connaissons. Seule la modeste métairie où avait dû se cacher son père avait échappé à la fureur des éléments !
Tombé dans le plus profond oubli, le site de Pontaillac est redécouvert en 1850 par un bouillonnant homme d'affaires bordelais nommé Jean Lacaze, alors qu'il s'adonnait en famille au rituel d'une promenade à dos d'âne le long de la côte. C'est ainsi qu'il tomba sous le charme d'une pittoresque plage de sable fin... où il estima aussitôt que l'on pouvait loger trois mille baigneurs ! Très vite, un projet de lotissement se mit à germer dans l'esprit de cet homme d'affaires pressé, surtout quand il apprit que l'État, propriétaire des lieux, envisageait volontiers de s'en défaire, et que des sondages révélaient la présence de nappes phréatiques. Visionnaire, Jean Lacaze s'enthousiasma très vite, au point de parler un peu trop tôt autour de lui de son beau projet, et de se faire doubler par l'un de ses propres amis. D'une opiniâtreté qui n'a d'égal que son goût du commerce, Jean Lacaze parvint tout de même à acquérir les terrains qu'il convoitait, à la fin de 1855.
Jean et Athanase Lacaze, père et fils, promoteurs de Pontaillac.
Si quelques mystères planent encore à propos de la biographie de Jean Lacaze et l'origine de sa fortune, on sait cependant qu'il fréquentait assidument les milieux catholiques et conservateurs de Bordeaux. Ses opinons furent sans aucun doute l'une des sources de tension avec les édiles royannais du milieu du XIXe siècle, à majorité plutôt protestante et républicaine. Après la guerre de 1870, c'est son fils Athanase, ingénieur civil, qui reprend en main la destinée de Pontaillac. En 1898, le papier à en-tête de ce dernier annonce clairement ses intentions, puisqu'il y déclare être « le directeur-fondateur » d'une ville en construction, comprenant « le plus grand établissement de bains de Royan, un marché, un bureau de poste et télégraphe, de grands hôtels, une « église et chapelle », 140 villas et desservie par 80 voitures publiques et un tramway ». Une telle propagande n'arrange pas ses rapports avec la mairie de Royan, qui le soupçonne d'avoir pour objectif la création d'une petite commune « sécessionniste ».
En savoir plus : Royan moderne et ancien de Emma Ferrand et La Saga des Bains de Mer de Guy Binot aux Éditions Bonne Anse.