Mon nom est Jean Fonteneau, dit Alfonse de Saintonge, capitaine pilote.
Des incertitudes planent sur la date de ma naissance, probablement vers 1480. On m'a soupçonné d'avoir pris le nom de ma femme,
« Alfonse », laquelle était portugaise, en ajoutant « de Saintonge » car je serais né au Bourg de Saintonge, en Charente, près de Segonzac. Rien n'est moins sûr. Ne dit-on pas aussi que je serais né portugais ?
Il est attesté que j'ai vécu à La Rochelle, rue Saint-Jean-du-Pérot, et que je fus capitaine pilote de Jacques Cartier, en 1541, au Canada, avec Roberval.
Je suis l'auteur de divers documents nautiques et de récits de voyages, dont Les Voyages aventureux et surtout mon œuvre maîtresse, La Cosmographie, en 1544, dédiée à mon roi François Ier. « Je l'ay faict pour le service de Dieu, de Vostre Majesté et accroissement de la saincte foy catholicte et vostre état royal à qui Dieu doint longue vye et règne, avec augmentation de plus grands royaulmes et seigneuries à son service ».

J'étais un pilote hauturier, c'est-à-dire celui qui sait mesurer la « hauteur » des astres. Mettant ma science au service de la cartographie, j'ai dessiné, dans ma Cosmographie, une carte de la Gironde, laquelle semble être la première du genre.
Je l'ai assortie de la légende suivante : « On suyt la vray route pour aller en la très dangereuse rivyère de Gironde jusqu'en la noble et puyseante ville de Bourdeaulx en Guyenne », souhaitant par ces mots alerter les capitaines des nefs et des caravelles étrangères afin qu'ils comprennent la nécessité d'avoir recours aux services de pilotes saintongeais aptes à les guider, en déjouant les pièges de l'embouchure et les caprices de la rivière.
N'ayant jamais perdu un seul navire, il semble pourtant que je sois disparu en mer, de mort violente, en 1545, de la main des Espagnols, ennemis de mon pays, agissant sur l'ordre de Maximilien, le neveu de Charles-Quint.



Avec l'arrivée de la photographie et des cartes postales, la réalité des "dangers de Cordouan", funestes aux navires depuis des siècles, éclate au grand jour.
Au XVe siècle, les caravelles montant vers Bordeaux avaient souvent recours à un pêcheur pour leur servir de pilote.

