
Né vers 1535, Louis de Foix sort de l'ombre, après son départ en Espagne autour de 1560 où il se fait remarquer sur le chantier de l'Escorial de Philippe II par ses talents d'horloger et mécanicien, puis à Tolède dans des travaux d'hydraulique ; en même temps, il travaille sur le chantier du gigantesque palais au contact des grands architectes du moment. De retour en France, l'ingénieur se voit confier l'énorme chantier de détournement du cours de l'Adour à Bayonne ainsi que divers travaux de génie civil qui en font un ingénieur très réputé sans pour autant qu'il accède au rang d'architecte reconnu.

L'occasion se présente en 1582, avec le projet de reconstruction de la tour de Cordouan voulu par Henri III. Le contrat, signé en 1584 par Louis de Foix, le maréchal de Matignon et Montaigne alors maire de Bordeaux, traduit d'abord un défi technologique avec la construction d'une énorme plate forme circulaire et d'une grosse tour ronde de trois étages mais sans caractère somptuaire. La construction de la plate forme, travail titanesque compliqué par le contexte des guerres de Religion et les problèmes financiers, progresse lentement et est interrompue en 1592.

Louis de Foix, au sens politique aigu et négociateur talentueux, finit par convaincre Henri IV, alors en pleine reconquête de son Royaume et en recherche de légitimité, d'un nouveau projet, grandiose, conçu à la gloire de la monarchie. Le nouveau contrat de 1594 transforme la grosse tour à feu en un monument extraordinaire, véritable château royal construit en pleine mer. Louis de Foix, au prix d'innombrables difficultés, va pouvoir réaliser son rêve, construire un monument à nul autre semblable destiné à frapper les esprits des contemporains tant par sa conception que par sa situation. Cordouan couronne une carrière d'ingénieur domptant les éléments naturels et lui permet d'affirmer ses talents d'architecte jusque là refoulés.

Louis de Foix fait de Cordouan l'affaire de sa vie, longue bataille d'une vingtaine d'années à la fois sur le terrain dans des conditions épouvantables et en collecteur de fonds, confronté à de multiples oppositions. Sa marque personnelle est très présente dans le phare : son buste placé dans la chapelle face à l'autel et la longue dédicace célébrant la gloire et les mérites du « gentil ingénieux de ce superbe ouvrage », « phare de gloire », vainqueur des « flots du grondeux élément », traduisent sa fierté et son orgueil. Décédé en 1603, il ne verra pas l'achèvement de son chef d'œuvre poursuivi par son fils puis par Beuscher, son adjoint, maître maçon devenu architecte qui termine l'œuvre rêvée et conçue par Louis de Foix.

Une empreinte de Louis De Foix sur la vallée de la Dordogne ?
La présence attestée de l'architecte de la tour de Cordouan à Vayres, près de Libourne, en 1588, a ouvert la voie à une attribution flatteuse. En effet, le château vient d'être acheté en 1583, par Ogier de Gourgues, grand financier des travaux de construction de la nouvelle tour de Cordouan. C'est lui qui fait relever de 1585 à 1594, l'ancienne place forte, pour la transformer en aimable maison de campagne. Devenu au fil du temps un édifice certes pittoresque, mais aux formes complexes résultant d'une histoire architecturale riche et mouvementée, le château de Vayres englobe, entre éléments médiévaux et corps de bâtiment classiques, deux grandes parties qui correspondent aux deux campagnes de constructions successives commandées par Ogier de Gourgues. Si la première reste fidèle aux traditions provinciales, l'autre est l'expression d'une architecture savante, comme le montre la façade sur cour, traitée sous la forme d'une galerie à travées rythmiques qui renvoie aux grands traités et albums de gravures de la seconde moitié du XVIe siècle. Faut-il y voir la preuve d'une intervention de Louis de Foix ? Si l'hypothèse est séduisante, rien n'est cependant certain !
